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Recherche animale : l’importance de la transparence

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Recherche animale : l’importance de la transparence

Le 7 décembre 2020, Understanding Animal Research (UAR) organisait une remise de prix pour récompenser l’engagement en faveur de la transparence dans la recherche animale, pour la septième édition consécutive. Cette initiative est née de la volonté des organismes, des institutions, des universités et des centres de recherche de s’ouvrir au public afin d’instaurer un climat de confiance autour de travaux parfois perçus comme controversés.

 

Ces “openness awards”, qui récompensent l’excellence et l’innovation de projets de communication autour de l’utilisation des animaux dans la recherche, célèbrent un nouveau mouvement qui valorise la transparence et l’ouverture des laboratoires désireux de montrer et d’expliquer leurs travaux impliquant des animaux, une démarche qui n’est pas évidente pour tous.

De nombreuses idées fausses gravitent autour de la recherche animale, de ses pratiques et des conditions de ses expériences, notamment alimentées par quelques exemples de processus anciens, de communications mal interprétées et d’une culture du secret qui bloque tout dialogue. Mais les choses évoluent. Confrontées, il y a plusieurs années, à des résultats de sondages montrant une baisse du soutien du public envers la recherche animale en Angleterre, les institutions britanniques ont commencé à communiquer et à libérer leur parole, traditionnellement restreinte, autour de travaux qui sont parfois à l’origine de controverses.

 

Trop souvent la mésinformation prend le dessus car c’est la seule information. C’est pourquoi de nombreuses personnes pensent encore que les tests cosmétiques sont encore réalisés sur des animaux, alors que la pratique est interdite depuis 1998 en Angleterre et depuis 2013 en Europe.

 

La recherche animale et le grand public

En 2013, Understanding Animal Research a chargé Ipsos MORI de mener un dialogue public autour de la recherche animale. Il en ressort une volonté très nette d’évolution vers une communication plus ouverte et transparente sur le sujet. Le désir d’informations sur ce que vivent les animaux dans les laboratoires de recherche est réel, tout en évitant les images choquantes, au même titre qu’il n’est pas utile de montrer des personnes souffrant de problèmes de santé.

En réponse, UAR a lancé en 2014 un concordat qui s’inscrit exactement dans ce cadre. Les signataires s’engagent à améliorer leur communication autour de la recherche animale, à fournir des explications plus détaillées, des exemples plus précis et à assurer un accès facilité aux médias. Plus précisément, le concordat comprend quatre engagements :

  • être transparent sur les recherches qui utilisent des animaux ;
  • travailler plus étroitement avec les médias et le public ;
  • être proactif pour expliquer la valeur et les limites de la recherche animale ;
  • rendre compte annuellement et partager les progrès qui ont été faits dans ce sens.

 

Wendy Jarrett, directrice générale d’Understanding Animal Research et présidente du groupe de travail du concordat, a déclaré : « Pendant de nombreuses années, les seules informations ou images sur la recherche animale auxquelles le public pouvait accéder étaient fournies par des organisations opposées à l’utilisation des animaux à des fins de progrès scientifique. Le concordat a pour objectif de donner accès à des informations actualisées et de garantir leur exactitude et leur véracité, afin que le public puisse se faire sa propre opinion, de façon éclairée. »

La communication autour de la recherche animale doit ainsi fournir des données précises sur les avantages, les inconvénients et les limites des essais réalisés, être réaliste quant aux résultats potentiels attendus et prendre en compte les considérations éthiques et de bien-être animal.

Trop souvent, la mésinformation prend le dessus, car c’est la seule information. C’est pourquoi de nombreuses personnes pensent encore que les tests cosmétiques sont réalisés sur des animaux, alors que cette pratique est interdite depuis 1998 en Angleterre et depuis 2013 en Europe.

Le concordat vise également à combattre les idées reçues et à donner au public l’opportunité de voir comment les études sont menées, suivant quelles régulations, dans le but d’améliorer la santé globale. En effet, la recherche animale est encore un pilier central du progrès médical. Si elle est remplacée lorsque c’est possible, l’animal demeure incontournable pour de nombreuses découvertes à venir.

Selon Jeremy Farrar, directeur du Wellcome Trust en Angleterre, « la plupart des avancées importantes en médecine reposent sur des informations tirées d’expériences sur les animaux, et ce domaine de recherche reste essentiel pour conduire les améliorations en santé humaine et animale. Mais comme toutes les études, les expériences sur les animaux doivent être menées avec le consentement de la société, ce qui nécessite une ouverture et une transparence sur la manière et les raisons de leur déroulement ».

 

Trop souvent la mésinformation prend le dessus car c’est la seule information. C’est pourquoi de nombreuses personnes pensent encore que les tests cosmétiques sont encore réalisés sur des animaux, alors que la pratique est interdite depuis 1998 en Angleterre et depuis 2013 en Europe

 

La transparence pour obtenir l’assentiment

Les organismes signataires ont donc joué le jeu de la transparence, depuis maintenant sept ans, et les meilleures initiatives sont récompensées chaque année. Elles sont nombreuses, mais parmi celles-ci, citons le Royal Veterinary College qui a partagé avec le public ses travaux sur la dystrophie musculaire de Duchenne chez le chien.  L’université d’Édimbourg a également été récompensée pour son dossier médiatique sur des porcs génétiquement modifiés.

Parmi les initiatives remarquables, le site labanimaltour.org permet la visite virtuelle des laboratoires qui hébergent des animaux sur différents sites de recherche, mais également diffuse des films qui expliquent le travail au quotidien et les procédures expérimentales appliquées aux animaux. L’institut Pirbright, un centre d’excellence de la recherche mondiale qui œuvre pour la surveillance des maladies virales chez les animaux d’élevage et des zoonoses, a participé au projet et a ouvert ses portes pour montrer ses locaux et certaines interventions sur des vaches, des lapins et des porcs.

De même, l’université de Bristol a également communiqué sur ses travaux menés sur des porcs. Pourtant, il y a à peine deux décennies, des militants des droits des animaux posaient une bombe dans l’un de ses bâtiments ou visaient un scientifique vétérinaire. Désormais, une « positivité totale » répond à la mise en valeur de ses recherches sur les animaux, estime Maggie Leggett, directrice de la communication de l’université : « Nous croyons en l’ouverture. Nous utilisons pour cela l’argent public. Les gens ont le droit de savoir ce que nous faisons. »

 

Trop souvent la mésinformation prend le dessus car c’est la seule information. C’est pourquoi de nombreuses personnes pensent encore que les tests cosmétiques sont encore réalisés sur des animaux, alors que la pratique est interdite depuis 1998 en Angleterre et depuis 2013 en Europe

 

Recherche animale et résilience

L’ouverture au public ne fortifie pas pour autant la contestation. Au contraire, c’est le secret qui met à mal la confiance. « Être plus ouvert n’entraîne pas de plus grandes attaques de la part des groupes de défense des animaux, mais renforce plutôt la résilience de l’institution et la confiance du public », souligne ainsi Tom Holder, ancien responsable des campagnes d’UAR. Des propos corroborés par Andrew Parker, physiologiste à l’université d’Oxford, qui utilise des macaques rhésus pour étudier la vision binoculaire et évoque son travail en vidéo sur LabAnimalTour.org : « Un certain nombre de personnes m’ont dit “c’est assez courageux”, ce qui, au Royaume-Uni, veut généralement dire “risqué” », analyse-t-il. Car selon lui, « le climat a changé. La population est plus disposée à écouter les opinions des scientifiques sur la recherche animale, ce qui participe au renforcement de la confiance ».

Depuis le lancement du concordat en 2014, le volume des informations sur l’utilisation des animaux dans la recherche mises à la disposition du public a augmenté de façon substantielle. Presque les trois quarts (72 %) des signataires communiquent sur le nombre d’animaux qu’ils utilisent, sur leur site internet, alors qu’auparavant, aucun organisme britannique ne partageait de telles informations. En fournissant ces données, les organisations peuvent s’adresser directement aux personnes intéressées et démontrer pourquoi il est nécessaire et important d’utiliser des animaux pour mener à bien leurs travaux scientifiques. Certains signataires vont même au-delà des attentes du public.

Au final, le soutien de l’opinion à la recherche animale s’est stabilisé au Royaume-Uni, même s’il est difficile de démêler les causes des effets. En réponse aux efforts consentis par les laboratoires, le grand public a accueilli favorablement l’adoption d’une approche informative, sensible à ses préoccupations concernant les animaux et abordant les problématiques éthiques. Lors de tables rondes organisées en 2019, plusieurs participants ont même estimé que, contre toute attente, des informations claires sur la vie des animaux au sein des centres d’expérimentation étaient effectivement disponibles.

Ces résultats positifs ont eu des répercussions partout en Europe, où des efforts similaires ont été entrepris. L’Espagne (2016), le Portugal (2018) et la Belgique (2019) ont aujourd’hui leurs propres accords de transparence. Des institutions en France et en Allemagne explorent également les moyens d’adapter le modèle britannique. Peu à peu, le paysage évolue vers plus de transparence et de confiance dans la recherche scientifique.

 

 

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