Dans son troisième rapport* sur la SPA, rendu public le 15 mars 2017, la Cour des comptes constate que le bilan est mitigé et que de nombreuses « insuffisances » perdurent. Lors des deux précédents contrôles, en 2002 et 2009, les sages de la rue Cambon avaient été très critiques sur le fonctionnement de l’association et sur son utilisation des dons perçus. Pour remédier à ces dysfonctionnements, la SPA a été placée sous administration judiciaire pendant plus de trois ans, jusqu’en juin 2013, date de l’élection de l’équipe dirigeante actuelle. C’est dans ce contexte, sur la période 2011-2015, que s’est déroulé le nouveau contrôle de la Cour. Au final, si des progrès sont effectivement constatés, notamment en matière de gestion des legs, d’autres actions urgentes n’ont pas été engagées, comme la rénovation des refuges ou le renforcement du contrôle interne. Sept nouvelles recommandations sont ainsi formulées par la Cour.
La Cour des comptes a contrôlé l’emploi des fonds collectés par la SPA auprès du public de 2011 à 2015. Sur cette période, les ressources perçues ont atteint la somme de 177,4 millions d’euros (+ 27 % en cinq ans). À l’issue de ce contrôle, les dépenses sont apparues « globalement conformes aux objectifs poursuivis par l’appel à la générosité publique ».
Toutefois, deux carences sont pointées du doigt : « La défaillance du contrôle interne, qui n’a pas progressé depuis le précédent contrôle, à l’exception de l’amélioration de la gestion des legs », et « l’insuffisance et le retard de la rénovation des lieux d’accueil des animaux, déjà critiqués en 2002 », alors que les réserves financières accumulées atteignent 68 millions à la fin de 2015. En termes d’investissements, « à quelques exceptions près, aucune action d’envergure n’a été entreprise depuis 2009 » pour rénover les refuges et les dispensaires dont l’état de dégradation, voire d’insalubrité, est signalé depuis sept ans déjà. « Un retard dommageable », conclut la Cour.
Pourtant, si ce chantier n’avance pas et accuse un « retard chronique », ce n’est ce n’est pas par manque de moyens. Avec une trésorerie de plus de 66 millions (au 31 décembre 2015), lui permettant de couvrir près d’une année et demie de fonctionnement courant, la situation financière de la SPA est qualifiée de « très confortable ». L’association, fondée en 1845 et reconnue d’utilité publique en 1860, bénéficie de dons et de legs qui représentent, chaque année, plus de la moitié de ses ressources. Son budget annuel est d’environ 50 millions d’euros, selon la Cour. Sur la période contrôlée, les cinq exercices sont bénéficiaires.
Autre carence persistante relevée par la Cour, la mise en place d’un système organisé de contrôle interne, pourtant réclamée dans les deux précédents rapports pour sécuriser la gestion, « est à peine engagée ». De fait, même la phase préalable, celle de la définition « d’un référentiel formalisé et actualisé de toutes les procédures, connu de l’ensemble des intervenants, fait encore largement défaut aujourd’hui ». Par ailleurs, des défaillances sont identifiées dans l’application des procédures de contrôle : « remboursements injustifiés de frais de mission, lacunes dans les mécanismes de prévention des conflits d’intérêt, contractualisation très insuffisante des relations avec les fournisseurs et prestataires », etc.
Enfin, le climat au sein de l’association est loin d’être « serein », conséquence de six réorganisations successives depuis juillet 2013. L’instabilité de la direction générale (quatre directeurs généraux depuis 2011) et des cadres dirigeants, la forte rotation du personnel (plus de 50 % sur la période contrôlée), la complexité des relations entre les 650 salariés et les 3 000 bénévoles n’ont pas facilité la gestion de l’association et ont généré des discontinuités sur certains dossiers, comme le plan d’investissement, et des frais non négligeables de recrutement.
Au final, la Cour des comptes formule sept recommandations :
- arrêter définitivement et rapidement un programme d’investissement, assorti d’un échéancier détaillé de réalisation des opérations de rénovation et de construction, et se donner les moyens de le mettre en œuvre ;
- mettre en place un plan d’action pour le contrôle interne en s’appuyant sur la cartographie des risques récemment adoptée ;
- renforcer le dispositif de prévention des conflits d’intérêt ;
- inscrire en fonds dédiés les produits financiers issus de legs et de donations affectés et non utilisés ;
- mettre en place une procédure de remboursement des frais de mission avec des montants plafonnés, soumise à la production de justificatifs ;
- formaliser, par la conclusion de contrats, les relations avec les fournisseurs et les prestataires pour les montants supérieurs à un niveau à définir par le conseil d’administration ;
- renégocier périodiquement, dans le respect de procédures de mise en concurrence transparentes, les contrats avec les fournisseurs et les prestataires.
De son côté, la SPA défend son bilan**, estimant que « ses dépenses et ses ressources sont affectées correctement » et que son « ratio figure aujourd’hui parmi les meilleurs des associations françaises : pour 10 € dépensés, 7,8 € sont consacrés exclusivement à la cause animale ». La mise en place d’un « plan de gestion de la carrière des salariés » est en cours, et 34 millions d’euros ont été engagés, en 2016 et 2017, dans un plan de rénovation.
* http://www.ccomptes.fr/Accueil/Publications/Publications/La-Societe-protectrice-des-animaux
La SPA en chiffres selon le rapport
- Le nombre d’adoptions a augmenté de 35 % en cinq ans, passant de 28 193 en 2011 (3,2 millions de recettes générées) à 38 311 en 2015 (4,6 millions).
- La durée moyenne du séjour en refuge a baissé, passant de 95 jours en 2011 à 53 jours en 2015.
- 55 000 animaux sont pris en charge annuellement à fin 2015 (+ 31 % en cinq ans).
- 86 000 animaux sont soignés chaque année en moyenne : 191 573 actes sont comptabilisés en 2015, pour un montant de 8,5 millions, dont 5,8 millions d’honoraires versés aux vétérinaires libéraux (soit 68 %).
- Les retours après adoption restent stables à 5 %.