Les rats cohabitent avec les humains depuis toujours, et il en va de même pour leurs pathogènes. Bactérie, virus, parasites… plusieurs ont même évolué pour infecter l’humain. Les connaissances sur ces zoonoses sont fondamentales pour mieux prévenir et traiter ces maladies, et surtout pour apprendre à éviter l’émergence de nouvelles maladies comme cela a été le cas pour le COVID-19.
L’humain coexiste depuis des millénaires avec les rats. Depuis peu il les étudie et les apprivoise mais ils font depuis toujours partie intégrante de la culture et de l’histoire de l’humanité. Et pas toujours pour de bonnes raisons.
Souvent associés à la saleté, à des nuisibles, et à la maladie, les rats ont été porteurs de nombreuses pathologies qui ont été transmises à l’humain au cours du temps. On retiendra tous la peste noire qui tua des millions de personnes au 14ème siècle et qui laissa une cicatrice dans l’histoire. Parmi les plus graves zoonoses du rat, on identifiera aussi la leptospirose, la choriomeningite lymphocytaire, ou encore le sodoku.
Morsures, griffures, contact avec l’urine ou les excréments ou piqures d’un vecteur, suffisent souvent à contaminer. La connaissance de ces maladies est fondamentale afin de prévenir efficacement les pathologies et les traiter au mieux.
Mais pas seulement, la crise actuelle de COVID-19 nous rappelle que la connaissance des zoonoses est primordiale dans la gestion de nouvelles maladies émergentes d’origine animale. Il ne faut pas oublier que 60% de toutes les maladies infectieuses humaines émergentes proviennent de populations animales. Et une des dernière en date concerne le rat et l’hépatite E.
Un point sur les zoonoses du rat les plus connues.
Table des matières
Les zoonoses d’origine bactérienne
Les zoonoses transmises par le rat, d’origine bactérienne, sont les plus fréquentes.
La leptospirose
On note particulièrement la leptospirose, couramment appelée la « maladie du rat », souvent méconnue mais qui peut s’avérer particulièrement dangereuse. Elle affecte 600 personnes chaque année en France et touche particulièrement les travailleurs des zones marécageuses comme les agriculteurs et les égoutiers.
Les bactéries nommées « leptospires » sont principalement stockées dans les reins des animaux contaminés puis dans leur urine. Elles contaminent ensuite leur pelage et leur environnement se développant préférentiellement dans les milieux chauds et humides (eaux douces, sols boueux) où elles peuvent survivre durant plusieurs mois. Infectant par les voies transcutanées ou les muqueuses les bactéries peuvent entrainer des dommages au foie et aux reins.
La vaccination (3 injections puis rappel tous les deux ans) n’est recommandée que dans certaines indications restreintes, posées au cas par cas, notamment dans le cadre de la médecine du travail et en prenant en compte les risques environnementaux et individuels. Ce vaccin ne protège que contre la Leptospira interrogans, soit environ 30% des cas, et a de fréquents effets secondaires.
Les salmonelloses
Maladie bactérienne relativement fréquente et souvent redoutable, les salmonelloses d’origine animale sont également des zoonoses majeures. Si la principale cause de salmonellose chez l’Homme en Europe est la consommation de Salmonella Enteritidis dans les œufs crus et les produits dérivés, les rats sont souvent la cause de la contamination des poulaillers ou de l’environnement de l’Homme en zone urbaine.
Très résistante, la bactérie peut survivre longtemps dans le milieu extérieur. Infectant par voie digestive, lorsque la maladie émerge, elle touche essentiellement le système digestif et plus particulièrement les intestins, provoquant parfois des symptômes aigus.
Cependant, de nombreux animaux – et humains – peuvent être porteurs sains de la maladie et donc être capables de transmettre la maladie sans symptômes. De même, un sujet guéri peut excréter des salmonelles pendant plusieurs semaines. Traités avec des antibiotiques, la prévention et l’isolation des sujets malades sont primordiales pour éviter l’épidémie.
La fièvre de la morsure du rat
Un autre risque souvent méconnu est la fièvre de la morsure du rat, qui comme son nom l’indique est transmise par morsure. La bactérie principalement responsable, Streptobacillus moniliformis, est un hôte habituel de la cavité buccale du rat et est transmise à l’homme dans jusqu’à 10% des morsures.
La plaie de la morsure guérit rapidement, mais après une période d’incubation un syndrome viral aigu apparaît avec frissons, fièvre, vomissements, céphalées, dorsalgies et arthralgies. Cette maladie peut se révéler rapidement mortelle par septicémie en l’absence d’une antibiothérapie précoce. Non traitée, la fièvre par morsure de rat a une létalité d’environ 10%.
La peste bubonique
L’une des maladies transmises par les rats les plus dangereuses sur le plan historique est la peste bubonique (Yersinis pestis), mieux connue sous le nom de « peste noire », et ses variantes.
La peste principalement véhiculée par le rat, est transmise à l’homme par piqûres de puces de rongeurs infectés. Les puces transportées sur des rats sont considérées comme responsables de cette peste au Moyen Âge, qui en a tué des millions d’individus. Et malheureusement cette maladie est toujours d’actualité puisqu’elle sévit toujours de nos jours en Afrique, Asie et Amérique et fait partie des maladies actuellement ré-émergentes dans le monde.
Au cours du XXe siècle, l’utilisation de traitements antibiotiques et le renforcement des mesures de santé publique ont réduit très fortement la morbidité et la mortalité dues à cette maladie, mais n’ont pas permis de la faire disparaître. Près de 50 000 cas humains de peste ont été déclarés à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) entre 1990 et 2015.
Autres bactéries
Bien évidemment de nombreuses autres bactéries peuvent être véhiculées par les rats tels que plusieurs souches de Staphylococcus, Escherichia coli, Mycobacterium ou Campylobacter.
Les zoonoses d’origine virale
Le risque de zoonose par le rat peut également être viral.
Les hantavirus
Certaines espèces de rats sont des porteurs connus d’hantavirus. Le syndrome pulmonaire à hantavirus est l’une des maladies les plus graves transmises par des rongeurs, qui a particulièrement fait parler de lui ces dernières années dans les régions occidentales des États-Unis. Les premiers symptômes sont similaires à ceux de la grippe, mais ils s’aggravent rapidement en touchant poumons, reins et cœur.
S’il reste non traité, la maladie peut rapidement engager le pronostic vital. Nécessitant souvent une hospitalisation en soins intensifs, les infections sont graves et mortelles dans environ 40% des cas. Les rongeurs ne sont pas affectés par les virus, mais ils les propagent par la salive, l’urine et les matières fécales.
L’arénavirus LCMV
Comme plusieurs rongeurs, le rat peut aussi être porteur de l’arénavirus de la chorioméningite lymphocytaire (LCMV). C’est une maladie infectieuse virale transmise par la salive et l’urine des rats qui affecte principalement la fonction neurologique plus ou moins grave. Une infection pendant la grossesse a été associée à une hydrocéphalie congénitale, une choriorétinite et un retard mental chez l’enfant. Plusieurs études sérologiques menées en milieu urbain ont montré que la prévalence des anticorps anti-LCMV dans les populations humaines varie entre de 2% à 5%.
Cowpox et autres
En France, les rats peuvent également être porteurs asymptomatiques du virus du cowpox, qui fut utilisé autrefois pour vacciner contre la variole humaine. Ou encore des virus Puumala, Tula ou Séoul, responsables respectivement d’une néphropathie épidémique, d’une hématurie ou d’une fièvre hémorragique avec syndrome rénal. Mais la liste est bien plus longue.
Les zoonoses d’origine parasitaire
En France, comme de nombreux animaux, le rat est aussi impliqué dans des zoonoses parasitaires.
Il peut être porteur d’un nématode, la trichine (Trichinella spiralis), qui provoque par ingestion une gastroentérite. Comme de nombreuses espèces, le rat peut être aussi réservoir des toxoplasmes (Toxoplasma gondii), des cryptosporidies (Cryptosporidium spp.) ou encore un autre nématode parasite du foie chez le rat, Capillaria hepatica.
En milieu urbain, la contamination humaine résulte généralement d’un défaut d’hygiène et concerne principalement les enfants pouvant ingérer des œufs de parasites présents dans l’environnement.