Principales responsables des toxi-infections alimentaires collectives en France, les bactéries du genre Salmonella peuvent persister de façon asymptomatique dans les populations porcines. En tant que réservoirs pathologiques, les porcs représentent donc un risque sanitaire. Alors que la consommation de viande porcine dans les régions africaines devrait beaucoup augmenter dans les années à venir, les connaissances sur les salmonelles présentes dans cette zone restent pour la plupart parcellaires. Une équipe de recherche corrige ces lacunes.
En Europe, les bactéries du genre Salmonella représentent la cause la plus fréquente d’épidémies d’origine alimentaire. En France aussi, Salmonella est le premier agent pathogène confirmé dans les foyers de toxi-infections alimentaires collectives (Tiac).
On estime à plusieurs dizaines de millions le nombre de cas recensés chez l’homme chaque année dans le monde, responsables d’environ 100 000 décès annuels.
Chez les personnes en bonne santé, une infection par des salmonelles non typhiques entraîne majoritairement un épisode diarrhéique qui se résout sans traitement. Cependant, chez des patients dont le système immunitaire est affaibli, les conséquences sont bien plus graves. Une infection du sang ou d’autres organes, appelée salmonellose invasive, peut en effet se déclarer.
Au cours des vingt dernières années, les salmonelles non typhiques ont été les bactéries les plus répandues à être isolées du sang humain en Afrique subsaharienne, et elles continuent de circuler dans le secteur de l’agroalimentaire. Les élevages porcins contribuent, en partie, à cette propagation.
Les porcs peuvent transporter et transmettre une très grande variété de salmonelles non typhiques de manière asymptomatique, et sont donc un réservoir important pour ces agents pathogènes. Au cours des prochaines années, la consommation de viande porcine devrait augmenter considérablement en Afrique subsaharienne. Au Kenya, elle devrait ainsi s’accroître de 268 % entre 2010 et 2050, par exemple. Alors qu’elle représente un enjeu sanitaire de taille, la circulation dans les populations porcines de Salmonella non typhique dans cette région n’a jamais été étudiée en détail.
Des chercheurs ont naturellement voulu en savoir plus sur ces réservoirs africains, en prélevant des échantillons lors de l’abattage de porcs domestiques à Nairobi, Busia (Kenya) et Chikwawa (Malawi), entre octobre 2016 et mai 2017. Ainsi, des cultures sélectives, des tests antisérums et le séquençage du génome entier ont pu être effectués sur 647 prélèvements.
Dans 12,7 %, 9,1 % et 24,6 % des échantillons prélevés, respectivement à Busia, à Nairobi et à Chikwawa, des souches de salmonelles non typhiques présentant une diversité importante ont pu être isolées. Les porcs de ces régions excrètent une gamme variée de sérotypes de Salmonella, tels que Typhimurium, dont 66 % (21 sur 32) ont le potentiel de provoquer des maladies diarrhéiques chez l’homme. Cependant, aucune preuve n’indique que les porcs sont un réservoir pour les nouvelles lignées de S. Typhimurium et S. Enteritidis, ou d’autres, associées aux formes invasives de salmonellose non typhique en Afrique subsaharienne. La majorité des isolats de Salmonella issus de porcs recueillis étaient sensibles à tous les antibiotiques testés, et aucun n’a été classé comme multirésistant (résistant à au moins trois classes d’antibiotiques).
Par conséquent, seuls un nombre limité d’isolats semblent être d’une importance critique pour l’homme, en tant que potentiels agents zoonotiques. Cependant, les populations porcines africaines doivent demeurer sous surveillance, au fur et à mesure du développement du secteur des productions animales dans cette région du monde. Les porcs représentent en effet un risque non négligeable pour la santé publique et il est important de mieux comprendre la dynamique de transmission des souches zoonotiques. Ces informations faciliteront l’élaboration de stratégies d’intervention visant à limiter les cas de salmonellose humaine.