Les données de 2013 portant sur la résistance aux antibiotiques des bactéries zoonotiques, fournies par 28 États membres de l’Union, ont été analysées conjointement par deux agences européennes. Ce nouveau rapport* fait état de multirésistances qui continuent de se propager en Europe.
Pour la première fois, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) et le Centre européen de prévention et contrôle des maladies (ECDC) ont utilisé des critères similaires pour interpréter les niveaux de résistance microbiologique chez l’homme et chez l’animal, rendant la comparaison des données plus pertinente.
Les bactéries Campylobacter et Salmonella montrent des niveaux élevés de résistance aux antibiotiques courants chez l’homme et les animaux, ce qui conduit à une réduction des options de traitement pour certaines infections d’origine alimentaire parmi les plus fréquentes. Ainsi, des isolats de Salmonella multirésistants continuent de se propager en Europe. De même, plusieurs pays ont signalé une résistance importante des isolats de Campylobacter à la ciprofloxacine, un antibiotique critique, tant chez l’homme (54,6 % des C. jejuni et 66,6 % des C. coli résistants) que chez l’animal (54,5 % des C. jejuni et 68,8 % des C. coli chez les poulets de chair, 35,8 % des C. jejuni chez les bovins et 31,1 % des C. coli chez les porcs).
En outre, de nombreuses infections humaines à Campylobacter ont pour origine la manipulation, la préparation et la consommation de viande de poulet. Or des niveaux élevés de résistance aux fluoroquinolones sont relevés chez des isolats de Campylobacter issus à la fois de l’homme et des poulets de chair. De tels niveaux de résistance diminuent, là encore, les options pour traiter efficacement les campylobactérioses.
La résistance de Salmonella à plusieurs antibiotiques est élevée (31,8 % chez l’homme, 56 % chez les poulets de chair, 73 % chez les dindes, 38 % chez les porcs en engraissement)et la propagation persistante de clones multirésistants, ainsi que la survenue de gènes de résistance au sein de ces clones, à la fois chez l’homme et l’animal (poulets de chair, porcs et bovins), suscitent des inquiétudes.
Seul fait encourageant, la corésistance à des antimicrobiens d’importance critique pour les deux bactéries demeure faible. Les niveaux de corésistance chez Salmonella sont de l’ordre de 0,2 % chez l’homme, de 0,3 % chez les poulets de chair, et sont nuls chez les porcs en engraissement et les dindes. Pour Campylobacter, les taux de multirésistance et de corésistance aux antibiotiques critiques sont faibles chez l’homme (1,7 % pour C. jejuni et 4,1 % pour C. coli) et faibles à modérés chez l’animal (0,5 % des C. jejuni chez les poulets de chair et 1,1 % chez les bovins, 12,3 % des C. coli chez les poulets de chair et 19,5 % chez les porcs).
Le rapport inclut également des données relatives à la résistance de bactéries comme Escherichia coli, les entérocoques et Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (Sarm), chez l’animal et dans les aliments. Il ajoute ainsi une nouvelle pierre au “Plan d’action pour combattre les menaces croissantes de la résistance aux antimicrobiens” présenté en 2011 par la Commission européenne.
Résistance, multirésistance, corésistance
> Résistance aux antimicrobiens : il s’agit de la résistance d’une bactérie à un médicament antibiotique auquel elle était auparavant sensible.
> Bactéries multirésistantes : elles sont résistantes à au moins trois classes différentes d’antimicrobiens.
• Exemples de bactéries multirésistantes :
– Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (Sarm) ;
– entérocoques résistants à la vancomycine (ERV)
– entérobactéries productrices de bêtalactamases à spectre étendu (BLSE) (par exemple Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae) ;
– entérobactéries productrices de carbapénèmases (EPC), par exemple Klebsiella pneumoniae ;
– Pseudomonas aeruginosa ;
– Clostridium difficile.
> Corésistance : résistance combinée à deux antimicrobiens spécifiques d’importance critique.