La mort subite d’origine cardiaque est un enjeu de santé publique majeur. Mais les humains ne sont pas les seuls concernés. Les chiens et les chats y sont également sujets et partagent de nombreuses similitudes physiopathologiques et génétiques avec l’homme. Les animaux de compagnie pourraient donc bénéficier des connaissances rassemblées sur le sujet en médecine humaine, de même qu’ils pourraient devenir de bons modèles d’étude pour découvrir de nouvelles approches thérapeutiques au bénéfice de la santé globale, humaine et animale.
La mort subite est l’une des principales causes de décès chez l’homme dans les pays occidentaux. Au total, 400 000 personnes en meurent chaque année aux États-Unis. Dans environ 85 % des cas, la cause est d’origine cardiaque. La mort subite cardiaque est un événement fatal soudain et non traumatique chez un patient sans autre affection potentiellement mortelle. Le décès survient généralement dans l’heure qui suit l’apparition des symptômes. En France, environ 60 000 personnes sont touchées chaque année, soit environ une sur mille, en particulier des hommes qui sont trois à quatre fois plus souvent affectés que les femmes.
Cette affection, aussi soudaine qu’inattendue, représente un enjeu de santé publique majeur dans notre pays. D’importants efforts sont mobilisés pour améliorer la prise en charge de l’accident cardiaque, mais aussi booster les stratégies de prévention fondées sur des recherches épidémiologiques, génétiques et thérapeutiques. Ces travaux et les nouvelles connaissances publiées en médecine humaine pourraient bénéficier aux chiens et aux chats qui souffrent également de mort subite. En effet, chez les animaux de compagnie, la mort subite cardiaque survient aussi, mais les données physiopathologiques et de prévalence sont beaucoup plus rares. Les découvertes en médecine humaine pourraient-elles s’appliquer aux animaux, renforcer les connaissances en santé animale et éventuellement aider à leur prise en charge ? Pour le savoir, des chercheurs ont passé en revue les cardiopathies structurelles électriques et ischémiques les plus importantes chez l’homme, le chien et le chat susceptibles de conduire à une mort subite, en se concentrant sur la prévalence et les similitudes physiopathologiques et génétiques.
Il en ressort que de nombreuses maladies cardiaques responsables de mort subite chez les animaux et les humains partagent des mécanismes arythmogènes sous-jacents similaires et une génétique proche (bien que les connaissances sur la génétique sous-jacente chez le chien et le chat soient encore restreintes). Chez l’humain, de nombreuses données scientifiques pointent du doigt les maladies coronariennes comme cause principale de la mort subite cardiaque. Les cardiomyopathies, telles que la cardiomyopathie dilatée, la cardiomyopathie hypertrophique ou la cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène sont incriminées, tout comme les cardiopathies “électriques” sans anomalies structurelles. Chez le chien, les mêmes affections cardiaques électriques et structurelles peuvent provoquer une mort subite. En particulier, la cardiomyopathie dilatée et la cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène sont les deux causes structurelles les plus courantes de la mort subite cardiaque canine. Chez le chat, le rôle de la cardiomyopathie hypertrophique semble plus important et la maladie présente de nombreuses similitudes avec celle qui affecte l’homme.
Si de nombreuses mutations sur plusieurs loci ont été reliées à la mort subite cardiaque humaine, seules quelques mutations associées à la cardiomyopathie dilatée et à la mort subite ont été identifiées chez le chien, par exemple au niveau des gènes PLN (phospholamban) et TTN (titine). Mais d’importants progrès sont en cours. Pour le moment, le peu de données disponibles sur les mutations à l’origine des maladies structurelles et électriques provoquant la mort subite cardiaque chez le chien et le chat semble confirmer une origine génétique, comme chez l’homme.
La mort subite cardiaque présente donc de nombreux points communs entre les humains, les chiens et les chats. Les chercheurs en concluent que les informations publiées à partir de la médecine humaine pourraient éclairer les futures études vétérinaires, mais l’inverse s’applique également. Contrairement aux animaux de laboratoire tels que les souris et les rats, les chiens et les chats pourraient représenter de bons modèles spontanés pour de nombreuses maladies cardiaques électriques structurelles et primaires sous-jacentes à la mort subite cardiaque humaine. Les animaux de compagnie pourraient servir à étudier le développement de médicaments ciblant de nouvelles voies thérapeutiques ou modalités de traitement, telles que la thérapie génique ou par les cellules souches, au bénéfice de la santé globale. Mais avant d’en arriver à ce stade, davantage de recherches sont nécessaires pour mieux comprendre la pathogenèse, la physiopathologie, la génétique et la prévention de la mort subite cardiaque chez l’animal, afin d’identifier plus précisément les similitudes entre les différentes espèces.