Ces derniers mois, l’actualité ordinale a été riche en événements : nouveau Code de déontologie, nouveau site internet et nouveaux services en ligne pour les vétérinaires, et l’inscription du bien-être animal dans le marbre du nouveau code. Baptême du feu pour ce dernier point avec l’affaire de l’abattoir d’Alès. Michel Baussier, président du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires (CNOV), fait un point sur ces sujets.
Vous avez initié un tour de France pour présenter et échanger avec vos confrères sur le nouveau Code de déontologie vétérinaire (communication, définitions des différents établissements, etc.). Quel bilan tirez-vous de ces échanges, tant en termes d’attentes d’information, de lacunes, que de réactions ?
C’est effectivement la première fois dans l’histoire de notre Ordre professionnel que la publication d’un nouveau Code de déontologie est accompagnée d’un cycle de réunions en régions, permettant la présentation des nouvelles dispositions, mais surtout des échanges interactifs avec les confrères. Tous nous disent apprécier cette démarche confraternelle et conviviale, qui accroît la proximité avec leur conseil ordinal.
Les sujets qui suscitent le plus de réactions varient selon les régions, mais en général ce sont plutôt les modifications relatives aux règles de communication et au cahier des charges des établissements de soins vétérinaires qui nourrissent les débats. Sans omettre les questions sur la continuité ou à la permanence des soins, celles concernant le refus de prodiguer des soins ou encore la disparition des dispositions réglementaires relatives à la non-concurrence…
Sur la communication, il y a d’abord la prise de conscience que s’il y a d’un côté la liberté de communiquer en promouvant sa propre image, son établissement, il y a aussi l’obligation d’informer son client et le public en général. Une obligation de transparence. À mettre en parallèle, mais dans un sens inverse, avec le secret professionnel que la récente ordonnance sur la réforme de l’Ordre renforce…
Liberté de communiquer, mais dans des limites éthiques imposées par le caractère libéral et non commercial de notre profession. Sans compter que, dès lors qu’il est question de médicament vétérinaire, les règles de publicité sont devenues très strictes. Et pas principalement en raison du Code de déontologie.
Ghislaine Jançon, en charge du suivi de ces questions à l’Ordre, a réagi à certaines sollicitations concernant l’affaire de l’abattoir d’Alès. Cependant, les organisations professionnelles vétérinaires semblent avoir été gênées pour réagir officiellement, excepté l’Association vétérinaire équine française (Avef). Le bien-être animal est un point fort du nouveau Code de déontologie. Pourquoi une telle prudence sur ce dossier ? Cela ne laisse-t-il pas la place à l’extrémisme ?
Le bien-être animal est en effet un point important, non seulement du nouveau Code de déontologie, mais aussi de la loi qui organise dorénavant l’Ordre des vétérinaires.
Je crois qu’effectivement les organisations professionnelles vétérinaires ont pu être gênées pour répondre à la presse, pour la raison très simple que si les vétérinaires étaient certes interpellés ou mis en cause par l’opinion et les médias, pour autant aucune de ces organisations ne représentait les inspecteurs de santé publique, directement concernés, et elles n’avaient de ce fait aucune vraie légitimité à répondre. L’exercice de communication était délicat.
Les institutions et organisations représentant le secteur privé vétérinaire ne pouvaient pas prendre la parole en lieu et place de l’État !
Cela dit, elles ne se sont quand même pas dérobées et se sont livrées au seul discours qu’elles pouvaient tenir, sans esquiver les faits, mais en restant prudentes quant aux généralisations à ne pas commettre à partir d’un montage et aux déductions à ne pas faire trop rapidement.
Le 24 novembre prochain, vous organisez un colloque sur le vétérinaire garant du bien-être animal. Vous intégrez cette initiative dans le cadre des nouvelles missions confiées à l’Ordre. Comment vous projetez-vous sur ce dossier à moyen terme, notamment au niveau du quotidien des praticiens ?
L’Ordre, par l’ensemble de ses élus, a souhaité s’impliquer dans ce domaine et s’y exprimer autant que de besoin. De surcroît, cette possibilité a même été écrite dans la nouvelle loi régissant l’institution ordinale. Nous avons décidé de marquer ce tournant en organisant un premier colloque consacré à ce sujet.
Les praticiens sont de plus en plus nombreux, aujourd’hui, à intégrer le bien-être animal dans leur pratique quotidienne. En particulier, la lutte contre la douleur a pleinement droit de cité dans les cabinets et cliniques vétérinaires. Ils auront ainsi d’autant moins de difficulté à être en phase avec la volonté ordinale de s’engager sur ce registre.
Nous allons procéder tranquillement et par étapes, en privilégiant l’approche scientifique première et sans omettre que la profession vétérinaire ne doit pas oublier d’où elle vient et pourquoi elle a d’abord été créée.
Il ne saurait en aucun cas être question de renier l’élevage, tel qu’il résulte de la domestication animale par l’homme. Sans dénier à chacun de ses membres sa liberté de conscience et de choix, la profession, en tant que telle, ne saurait combattre la propriété de l’animal domestique par l’homme. En revanche, elle doit être exigeante dès lors qu’il s’agira pour elle de considérer les devoirs de l’homme vis-à-vis des êtres sensibles que sont les animaux qu’il a domestiqués. Devoirs de l’homme en matière de bien-être animal. Devoirs du vétérinaire en matière de respect des animaux qui lui sont présentés et d’engagement dans la lutte contre la douleur qui pourrait les affecter.