Entre la mi-septembre et la fin novembre, l’Europe a vu repartir à la hausse les cas d’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP H5) chez les oiseaux sauvages comme dans les élevages. Dans une analyse conjointe, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) et le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) préviennent que de nouveaux foyers sont probables jusqu’à la fin de l’hiver, même si le risque pour la population est considéré comme faible.
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Une vague automnale d’une ampleur inédite depuis 2016
Selon ce bilan, établi pour la période du 6 septembre au 28 novembre 2025, 2 896 détections du virus IAHP H5 ont été rapportées en Europe, dans 29 pays, dont 442 dans des élevages ou chez des oiseaux domestiques et 2 454 chez les oiseaux sauvages. Les oiseaux d’eau (canards, oies, cygnes) sont en première ligne avec, fait marquant, des épisodes de mortalité massive chez les grues cendrées. La plupart des cas sont liés au nouveau variant d’un génotype H5N1 déjà rencontré en Europe, mais qui semble soit plus transmissible, soit qui affecte des populations d’oiseaux peu ou pas immunisées.
Les élevages pris dans la tourmente des migrations
Comme lors des saisons précédentes, le virus « entre » dans les bâtiments d’élevage via les oiseaux sauvages, le plus souvent de manière indirecte (fientes, poussières contaminées, eau ou fourrages souillés). Les élevages de dindes sont particulièrement touchés, mais les autorités signalent aussi des cas dans des troupeaux de canards pourtant vaccinés, signe d’une forte pression virale.
L’Efsa et l’ECDC recommandent, dans toutes les zones où la grippe aviaire circule chez les oiseaux sauvages et où des mortalités massives sont observées, de maintenir les volailles confinées, de renforcer les mesures de biosécurité (limitation des entrées, changement de tenue et de chaussures, protection des points d’eau et des aliments) et d’intensifier la surveillance clinique et virologique pour détecter très tôt tout foyer.
Renards et chats, sentinelles involontaires
La circulation intense du virus dans l’avifaune se traduit aussi par une légère hausse des cas chez les mammifères, en particulier les renards, contaminés après l’ingestion d’oiseaux infectés. Plus inquiétant encore, le virus a de nouveau été détecté chez des chats domestiques dans deux pays européens, après plusieurs mois sans signalement. Là encore, la source la plus probable reste le contact direct avec des oiseaux malades ou leurs carcasses.
Les experts rappellent quelques règles de prudence : éviter de nourrir les animaux de compagnie avec de la viande ou des abats crus et, dans les zones où le virus circule activement, limiter les sorties non surveillées des chiens et des chats, en les gardant à l’intérieur ou en laisse.
Un risque humain faible mais surveillé de près
Chez l’humain, l’ECDC continue de juger le risque « faible » pour la population générale et « faible à modéré » pour les professionnels exposés (éleveurs, vétérinaires, intervenants en abattoirs, équipes de nettoyage des foyers). Aucune transmission interhumaine n’a été documentée en Europe à ce jour, même si des infections sporadiques liées à des contacts étroits avec des volailles infectées ont été enregistrées dans le monde ces derniers mois.
Les agences européennes insistent néanmoins sur l’importance des équipements de protection individuelle sur le terrain (masques, lunettes, gants) et sur la vaccination contre la grippe saisonnière des travailleurs exposés, qui peut réduire le risque de coïnfection et donc de recombinaison entre les virus humains et aviaires.
Un test pour la réponse européenne
Ce nouvel épisode de grippe aviaire arrive alors que le virus H5N1 a déjà provoqué, depuis 2021, l’abattage de centaines de millions de volailles à l’échelle mondiale, fragilisant la filière avicole et le marché agro-alimentaire. En Europe, la saison 2025-2026 constitue un test grandeur nature : celui de la capacité des États membres à combiner la vaccination de certains cheptels, le confinement temporaire des animaux, une biosécurité renforcée et une surveillance coordonnée de la faune sauvage.
Les modèles présentés par l’Efsa anticipent un maintien de la circulation virale dans les populations d’oiseaux sauvages durant les prochaines semaines, avec un reflux attendu seulement en fin d’hiver, au gré des migrations et des conditions météorologiques. D’ici là, la vigilance reste de mise, tant pour protéger les élevages que pour surveiller les rares passerelles possibles entre santé animale et santé humaine.

