Une équipe de spécialistes en cardiologie vétérinaire entreprend actuellement une étude inédite sur l’influence des mutations génétiques sur la cardiomyopathie dilatée, une maladie potentiellement mortelle qui affecte près de la moitié des chiens de race dobermann. L’équipe américaine, qui étudie déjà la maladie chez plus d’un millier de dobermanns depuis près d’une décennie, réunit des chercheurs vétérinaires de l’université de Floride, de l’université de l’Illinois et de la société spécialisée Mass Veterinary Cardiology Services dans le Massachusetts.
Bien que la cardiomyopathie dilatée affecte de nombreuses races de chiens, elle touche plus particulièrement le dobermann, selon les chercheurs. Cette maladie cardiaque héréditaire peut entraîner une mort subite provoquée par une tachycardie ou une fibrillation ventriculaire, avant l’apparition d’une insuffisance cardiaque congestive. Lorsque l’insuffisance cardiaque se déclare avant la mort subite, et malgré des traitements appropriés, la survie est courte et le taux de mortalité à un an est de 90 %.
Si la recherche sur la maladie a progressé ces dix dernières années, des questions demeurent et il reste encore de nombreuses inconnues qui nécessitent de mener une étude à long terme, couvrant l’ensemble du territoire américain. Les chercheurs ont donc lancé un essai clinique prospectif ambitieux, incluant quelque 300 dobermanns dépistés et suivis longitudinalement pour une cardiomyopathie dilatée, dans le cadre de la pratique vétérinaire ou d’expositions nationales et régionales.
Les chiens recrutés seront suivis tout au long de leur vie. Ils seront soumis à des tests de dépistage génétique à partir de frottis buccaux confiés pour analyse au North Carolina State University Veterinary Cardiac Genetics Laboratory, des enquêtes seront menées auprès des propriétaires et tous les résultats seront enregistrés pour chaque chien, suivi individuellement. Le Doberman Pinscher Club of America contribue à cette étude à hauteur de 12 250 $, destinés à couvrir le coût des tests pour les dobermanns participants.
Bien qu’il existe deux mutations génétiques connues associées à la cardiomyopathie dilatée chez le dobermann, certains chiens sans mutation déclarent la maladie, tandis que d’autres, porteurs d’une seule ou des deux mutations, peuvent ne jamais être affectés. De nombreux travaux de recherche seront menés simultanément pour tenter de comprendre pourquoi certains dobermanns développent la maladie et d’autres pas, et pourquoi les nombreux porteurs de la mutation génétique l’expriment différemment.
Si la génétique permet de déterminer les facteurs de risque de développer une maladie héréditaire, les scientifiques ne savent pas grand-chose sur les implications. Par exemple, si la seule information issue de l’étude d’une population de dobermanns est son statut vis-à-vis d’une maladie génétique, cela permet juste d’affirmer que 80 % des chiens porteurs de telle mutation développeront la maladie. Mais qu’y a-t-il d’unique ou de spécifique chez les 20 % de chiens non malades ? Quels facteurs influencent l’expression de la maladie dans le groupe des 80 % ? Autant de questions auxquelles l’étude en cours devra apporter un éclairage, en plus de fournir des informations de base sur l’ensemble de la population canine étudiée.
Tous les cardiologues vétérinaires du pays seront mis à contribution pour aider à suivre ces chiens et à effectuer des dépistages réguliers. De plus, les chercheurs tenteront d’aller au-delà de la génétique pour évaluer l’influence des facteurs environnementaux, nutritionnels, épigénétiques, etc., sur l’expression de la cardiomyopathie dilatée.