Dans une étude* clinique, des scientifiques russes et anglais montrent que l’injection directe d’ADN dans les tendons et les ligaments permet à des chevaux boiteux de revenir au top de leur forme après seulement deux mois de traitement. Pour la première fois, ils ont utilisé la thérapie génique pour restaurer des lésions sévères du ligament suspenseur et du tendon fléchisseur chez le cheval. Ils ont injecté de l’ADN plasmidique codant pour deux facteurs de croissance spécifiques à l’espèce équine (facteur de croissance endothélial vasculaire 164 et facteur de croissance des fibroblastes 2) sur le site de lésions de desmite et de tendinite. En trois semaines, les deux chevaux de l’étude marchaient et trottaient, et deux mois plus tard, ils étaient de nouveau en condition et de retour en compétition.
Les effets du traitement ont été évalués via des examens cliniques et échographiques sur une période de quelques mois. Les auteurs ont montré que la thérapie génique, utilisée dans un délai de deux à trois mois après la lésion, entraîne la récupération complète des fonctions locomotrices et la restauration du tissu conjonctif autour du ligament suspenseur et du tendon fléchisseur superficiel endommagés.
Les lésions tendineuses ou ligamentaires sont l’une des causes les plus fréquentes de troubles locomoteurs chez les chevaux, de tout âge et de toute race. Les boiteries sont également souvent à l’origine de la décision d’euthanasie des chevaux âgés et un problème courant chez les chevaux de course après une chute. Les chercheurs de l’école de médecine vétérinaire de l’université de Nottingham (Royaume-Uni) démontrent aujourd’hui que l’injection directe de deux gènes de croissance dans la zone lésée entraîne une guérison rapide.
En médecine humaine, l’utilisation de protéines recombinantes et la thérapie génique sont les approches les plus prometteuses dans le traitement des troubles musculo-squelettiques. Mais jusqu’à présent, cette démarche n’avait jamais été testée sur les lésions tendineuses ou ligamentaires du cheval. C’est désormais chose faite, chez deux chevaux de sport devenus boiteux à la suite d’une blessure.
Le premier cas est celui d’un cheval de dressage de 13 ans, souffrant d’une desmite à l’antérieur droit depuis une dizaine de jours. Le second cas, un cheval mâle de 9 ans, présentait une tendinite à l’antérieur gauche depuis près d’un mois. À J21 après l’injection d’ADNp, aucune boiterie n’était plus observée, à la fois au pas et au trot. Les chevaux n’ont montré aucune réaction douloureuse au test de flexion de l’articulation du boulet. À J40, l’état de la zone lésée présentait une nette amélioration à l’échographie (augmentation de l’échogénicité). À J65 après l’injection des deux gènes, le premier cheval a même remporté une compétition internationale de dressage sans présenter aucun signe de boiterie. Plus de 12 mois après le traitement, les deux chevaux traités par thérapie génique ont recouvré leur condition physique et ont retrouvé le chemin de la compétition. Aucun d’eux n’a montré d’effets cliniques indésirables consécutifs à l’injection.
Si ce traitement devient accessible dans les cliniques vétérinaires, il permettra de traiter plus efficacement les boiteries et la douleur associée chez tous les chevaux atteints, et plus particulièrement chez les pur-sang de course, leur évitant ainsi une réforme précoce, voire l’euthanasie.
Les traitements conservateurs ou chirurgicaux actuels affichent un taux de rechute de 60 % et si la médecine régénérative fait beaucoup mieux (taux de rechute inférieur à 20 %), la récupération s’étale sur cinq à six mois.
L’étude a des implications non seulement en médecine vétérinaire, mais aussi en médecine humaine, car les lésions des tendons et des ligaments sont également fréquentes chez l’homme. Les auteurs ont montré que le soulagement de la douleur et la restauration de la fonction sont possibles, dans un délai beaucoup plus court que les traitements disponibles actuellement. En outre, ce type de thérapie pourrait être utilisé pour traiter d’autres blessures, allant des problèmes de fertilité jusqu’aux lésions de la moelle épinière.
La prochaine étape consistera à mener un essai clinique plus important afin d’inclure davantage de chevaux, voire de traiter d’autres troubles, avec l’espoir qu’un jour ce traitement fera la preuve de son innocuité et de son efficacité à grande échelle, et qu’il sera disponible en routine. Il reste de nombreuses questions à résoudre avant que la thérapie génique ne soit largement utilisée en pratique vétérinaire, mais cette étude est prometteuse et marque une avancée réelle dans le traitement des troubles orthopédiques chez l’animal et chez l’homme.