C’en est fini du rhinocéros de Bornéo (Dicerorhinus sumatrensis harrisoni) à l’état sauvage, ou presque. Les deux derniers spécimens de cette sous-espèce du rhinocéros de Sumatra, lui-même en danger critique d’extinction, ont été aperçus en 2013. Depuis, plus rien.
C’est l’État malaisien de Sabah, situé au nord-est de l’île de Bornéo, qui a annoncé la disparition officielle du rhinocéros de Bornéo sur son territoire. Cette île du sud-est asiatique, partagée en trois entre la Malaisie, l’Indonésie et Brunei, n’abriterait plus le grand mammifère qui portait son nom. Et même si la partie indonésienne de l’île n’a pas encore confirmé cette extinction, l’effectif est trop faible pour assurer la reproduction naturelle de l’espèce.
En captivité, il ne reste plus que trois individus vivants : un mâle et deux femelles, hébergés dans la Tabin Wildlife Reserve, à l’est de Sabah. Selon l’association Borneo Rhino Alliance (Bora), la survie des rhinocéros de Bornéo repose désormais uniquement sur eux. Un bien maigre espoir, d’autant que les deux femelles présentent des lésions de l’appareil reproducteur. Pourtant, elles produisent des ovocytes. Ainsi, sur les recommandations des experts de la reproduction du Leibniz Institute for Zoo and Wildlife Research (Berlin), ces trois survivants font l’objet de tentatives de fécondation in vitro.
Par ailleurs, des chercheurs ont démontré la nécessité vitale de considérer les survivants de l’espèce et de sa sous-espèce comme une unité de conservation unique, leurs différences génétiques étant minimes. Ils ont proposé de faire se reproduire les rhinocéros de Bornéo avec des rhinocéros de Sumatra, eux aussi en danger critique d’extinction. Si cette solution peut contribuer à leur survie, elle entérine aussi le sacrifice de la sous-espèce de Bornéo au profit d’une espèce hybride.
Le rhinocéros de Bornéo a souffert de la déforestation massive et de la fragmentation de son territoire naturel, causées par l’exploitation forestière puis par la culture des palmiers à huile. De plus, la destruction de son habitat a ouvert la voie aux braconniers jusqu’au cœur de la forêt. Victime de ses deux cornes, la chasse et le trafic au profit de la médecine traditionnelle ont eu raison de ce mammifère asiatique vieux de quelque 20 millions d’années.