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Abattoirs : onze associations de protection animale interpellent Stéphane Le Foll

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Abattoirs : onze associations de protection animale interpellent Stéphane Le Foll

Dans un courrier cosigné et adressé au ministre de l’Agriculture, onze organisations nationales de protection des animaux* montent ensemble au créneau pour dénoncer les violations des textes nationaux et européens par les abattoirs français. Elles demandent à Stéphane Le Foll des mesures pour mettre un terme, d’ici à la fin de l’année, aux infractions récurrentes constatées lors de la mise à mort des animaux. Une telle mobilisation sur un même sujet, très rare, montre bien l’exaspération qui les anime. Le temps des promesses et des discours semble révolu, des actes forts sont désormais attendus.

 

DGCCRF : la répression des fraudes publie ses résultats 2014Il faut dire que les dysfonctionnements dans les abattoirs, nombreux et répétés, ne sont pas nouveaux. Ils sont régulièrement et depuis des années dénoncés et remontés au ministère, soit par les associations de protection animale, soit par les services d’inspection de la Commission européenne. Ainsi, la dernière évaluation du bien-être animal lors de l’abattage en France, issue d’un audit effectué en avril 2015 par l’Office alimentaire et vétérinaire (OAV), fait état d’importants manquements à la législation sur la protection des animaux.

Déjà en 2009, le rapport de One Voice, « Derrière les portes des abattoirs de France », avait révélé nombre d’infractions généralisées et de pratiques scandaleuses. L’association avait mené l’enquête pendant un an et concluait que « non seulement les normes strictes de protection des animaux ne sont pas respectées, mais un grand nombre d’animaux souffrent ou sont maltraités ».
À cela viennent s’ajouter les récentes images choquantes de la vidéo réalisée par l’association L214 à l’abattoir d’Alès, où certaines infractions constatées, particulièrement graves, s’apparentent plutôt à des actes de cruauté.

Face à ces agissements généralisés et qui perdurent, les procédures de contrôle des abattoirs apparaissent largement insuffisantes, voire totalement inadaptées, selon les cosignataires. Ils déplorent en outre l’absence de poursuites dissuasives à l’encontre des opérateurs mis en cause. Le rapport de l’OAV souligne en effet qu’aucune sanction pénale n’a été appliquée en 2013, 2014 ou encore en 2015. Des mesures complémentaires s’imposent donc, notamment pour mettre fin aux carences relevées au niveau des modes opératoires, en particulier les lacunes qui touchent au contrôle des signes d’inconscience des animaux avant la découpe ou à la surveillance de l’étourdissement, le plus souvent incomplet.

Une liste des manquements les plus graves, issus du rapport de l’OAV et des documents publiés par L214 sur l’abattoir d’Alès, est fournie au ministre, appelé à prendre des mesures urgentes pour y mettre un terme, incluant :

  • la saisine de la Brigade nationale d’enquêtes vétérinaires et de la Mission d’audit sanitaire de la Direction générale de l’alimentation afin de mener des inspections dans tous les abattoirs ;
  • la prise de sanctions pénales dissuasives à l’encontre de l’abattoir d’Alès ainsi que de tous les abattoirs où des infractions ont été constatées, dont ceux visités par l’OAV ;
  • le renforcement en urgence des procédures d’inspection de l’ensemble des modes opératoires normalisés et des registres des abattoirs ;
  • le développement de solutions alternatives à l’usage de fortes concentrations de CO2 pour l’étourdissement des porcs.

D’ici à la fin de l’année, si les réponses du ministère ne sont pas suffisantes pour assurer l’application et le respect de la législation communautaire, une plainte officielle sera déposée auprès de la Commission européenne par les signataires, qui ne doutent pas alors de voir la France sanctionnée.

 

* Compassion in World Farming (CIWF) France, Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (OABA), Protection mondiale des animaux de ferme (Welfarm), L214, Ligue française pour la protection du cheval (LFPC), Fondation Assistance aux animaux, Fondation 30 Millions d’amis, Fondation Droits animal éthique et sciences (LFDA), Fondation Brigitte Bardot, Confédération des SPA de France (CNSPA), Société protectrice des animaux (SPA).

 

Les manquements et infractions constatés

 

> Dans le rapport de l’OAV :

  • usage de courants électriques bien en dessous des normes minimales exigées par le règlement 1099/2009 pour l’étourdissement par électronarcose des volailles ;
  • étourdissement des volailles insuffisant dans le cadre de l’abattage rituel, « le courant électrique appliqué provoquant seulement des souffrances additionnelles » ;
  • abattage des moutons avec étourdissement par électronarcose ne respectant pas les niveaux de courant électrique minimum pour 8 animaux sur 10 dans un des abattoirs visités ;
  • lacunes au niveau des modes opératoires normalisés et des registres sur le bien-être animal, parfois inexistants. En abattoirs de volailles, le suivi de l’étourdissement ou, pour l’abattage rituel, celui de la présence de signes de vie, sont dans la plupart des cas incomplets, manquant la consignation de paramètres essentiels tels que la vérification de signes de vies/de conscience, la durée d’exposition ou la température du gaz pour l’étourdissement. Les animaux peuvent alors subir la découpe ou la transformation alors qu’ils sont encore vivants et sensibles ;
  • absence de vérification routinière des volumes d’abattage rituel effectués en comparaison avec les commandes commerciales nécessaires, en application du décret du 28 décembre 2011 ;
  • usage de matériels non adaptés, tel que des boxes d’immobilisation sans possibilité d’ajustement à la taille d’animaux de différents gabarits, ou l’absence de certains matériels essentiels, comme les systèmes d’apaisement par contact avec la poitrine pour les volailles, en violation de l’article 15 et de l’annexe II du règlement 1099/2009 ;
  • absence d’alimentation et de litière lorsque les animaux restent plus de 12 heures à l’abattoir, en violation de l’annexe III du règlement 1099/2009.

 

> à l’abattoir d’Alès :

  • des animaux qui recouvrent la conscience après l’étourdissement, en violation de l’article 4.1 du règlement 1099/2009 ;
  • l’étourdissement d’un cheval avec une tige perforante qui ne permet pas de provoquer la perte de conscience, en infraction avec l’article 3.1 du règlement 1099/2009 et l’article 2(f) ;
  • des boxes de contention pour bovins et moutons inadaptés à la taille des animaux, contrevenant à l’article 15 du règlement 1099/2009 ;
  • plusieurs reprises d’égorgement réalisées sur des bovins et des ovins abattus sans étourdissement, après des premières saignées mal effectuées ;
  • la forte souffrance des porcs lors de l’étourdissement au CO2, bien qu’autorisé par le règlement 1099/2009, avant la perte de conscience. Depuis près de 20 ans, la recherche scientifique a démontré que ce procédé pose de graves problèmes de bien-être animal. Le gaz conduit à une sensation de brûlure puis de noyade et peut provoquer une douleur aiguë pendant environ 15 à 30 secondes avant la perte de conscience. En 1996, une étude a mis en évidence une profonde aversion des porcs aux fortes concentrations de CO2 conduisant à de « sévères détresses respiratoires ». En 2004, l’Efsa a conclu qu’à des concentrations de plus de 30 %, ce gaz « est connu pour être aversif et provoquer l’irritation des membranes muqueuses qui peut être douloureuse, suscitant l’hyperventilation et le halètement avant la perte de conscience ». L’Efsa recommande alors que « le gaz utilisé pour provoquer la perte de conscience soit non aversif » et souligne que le développement de mélanges de gaz alternatifs est une priorité pour la recherche. En 2008, une autre étude a montré qu’immerger les porcs dans le CO2 provoque chez eux peur, douleur et/ou stress. L’Inra, en 2006, a mentionné l’observation de signes de souffrance respiratoire avec l’utilisation de ce gaz.

 

 

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