jeudi, novembre 21, 2024
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L’antibiorésistance continue de gagner du terrain 

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L’antibiorésistance continue de gagner du terrain 

La résistance aux antibiotiques se propagerait plus rapidement que prévu chez les bactéries pathogènes humaines et animales. Un transfert génétique important entre les bactéries de nos écosystèmes serait en cause, mais certains facteurs, comme la prise en compte du bien-être animal en élevage, ne doivent pas être négligés.  

 

Selon l’Organisation mondiale de la santé, la résistance aux antibiotiques est l’une des plus grandes menaces pour la santé, la sécurité alimentaire et le développement à l’échelle planétaire. L’antibiorésistance serait déjà à l’origine de plus de 33 000 décès par an, rien qu’en Europe, et ce chiffre pourrait augmenter dans les années à venir.

Les résistances passent assez facilement d’une bactérie à l’autre, par le biais de plasmides porteurs de gènes de résistance. Ce processus, appelé conjugaison, permet à une bactérie d’acquérir de nouvelles caractéristiques présentes chez d’autres, dont la résistance aux antibiotiques. Il est donc important de mettre en place des mesures susceptibles de freiner ce transfert, en limitant par exemple l’utilisation abusive des antimicrobiens.

Malgré les efforts consentis, les chercheurs ont remarqué qu’au cours des dernières années, les gènes de résistance se propagent aux agents pathogènes humains à un degré beaucoup plus important que prévu. De nombreux gènes semblent notamment provenir d’un large éventail d’espèces et d’environnements bactériens, comme le sol, l’eau et les végétaux. C’est assez surprenant. Bien que la conjugaison soit un phénomène courant, les chercheurs pensaient qu’elle se limitait à des types bactériens distincts. En effet, les plasmides appartiennent à différents groupes de mobilité (ou groupes MOB) qui ne peuvent pas être transférés entre n’importe quelles espèces bactériennes.

Mais de nouvelles méthodes d’analyse de données, qui ont permis d’étudier les séquences génétiques de plus de 4 600 plasmides naturels provenant de différents types de bactéries, semblent confirmer l’existence d’un transfert génétique beaucoup plus étendu que prévu. En effet, non seulement le nombre de plasmides mobiles est apparu deux fois plus élevé, mais celui des espèces bactériennes possédant des plasmides mobiles a presque doublé. En outre, les séquences génétiques qui permettent la conjugaison semblent beaucoup plus nombreuses.

En conséquence, les transferts génétiques sont beaucoup moins restreints qu’on le pensait et peuvent avoir lieu entre de nombreuses bactéries assez distinctes. Les échanges entre les bactéries humaines, animales, végétales, du sol, des milieux aquatiques et de l’industrie seraient donc non seulement possibles, mais assez fréquents. Les gènes de résistance pourraient donc provenir d’un réservoir génétique naturel beaucoup plus grand que ce qui avait été précédemment envisagé.

Cette estimation inquiète. La menace de l’inactivation de notre seule arme contre les bactéries est bien réelle. Si les bactéries multirésistantes continuent de croître et de se développer, il deviendra de plus en plus difficile de contrôler des infections qui, aujourd’hui, peuvent être traitées en quelques jours. Les conséquences seront sévères, la santé et le bien-être général seront compromis, tant pour l’homme que pour l’animal.

Pour éviter que cela ne se produise, des politiques de santé mondiales visent à réduire les infections, à maintenir l’efficacité des médicaments, à lutter contre l’utilisation abusive d’antibiotiques et à développer des solutions alternatives, avec une attention particulière portée au milieu agricole. En effet, au total, les antibiotiques sont davantage consommés par les animaux d’élevage que par les populations humaines. Ils font donc largement partie de l’équation et de l’équilibre en jeu.

Mais le risque varie selon les différentes exploitations agricoles. La race de l’animal élevé entre notamment en ligne de compte, mais pas seulement. L’usage d’antibiotiques peut également être influencé par des facteurs spécifiques à l’élevage, comme les procédures de bien-être et de biosécurité ou la relation agriculteur-vétérinaire. En outre, des normes élevées de biosécurité interne et externe, et des pratiques préventives instaurées à la ferme, peuvent conduire à une amélioration de la santé et de la productivité des animaux, qui à son tour aboutit à une réduction de l’utilisation d’antibiotiques.

Cependant, les pratiques et les opinions de certains éleveurs concernant l’utilisation des antibiotiques peuvent freiner les changements nécessaires pour éviter l’apparition de foyers de résistance. Certains sont notamment réticents à l’idée de supprimer ou de modifier le recours à ces médicaments, et cela malgré la corrélation désormais établie entre biosécurité, normes de bien-être et de santé, performances des animaux et l’usage raisonné des antibiotiques.

Il est donc important de continuer à dialoguer avec les consommateurs d’antibiotiques sur le terrain afin que les politiques globales soient mises en œuvre et comprises, au profit des animaux mais aussi de l’homme. À l’avenir, pour lutter contre l’antibiorésistance, les chercheurs recommandent notamment de mettre l’accent sur les stratégies visant à améliorer la biosécurité, à la fois externe et interne, ou sur des programmes ciblés de bien-être animal pour satisfaire les besoins spécifiques de chaque élevage.

 

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